Quand la commémoration d’attentats devient une leçon de vie

On explique souvent le fait d’enseigner comme celui de laisser une marque chez l’élève, cela est tout à fait juste. C’est une des étymologies du mot latin insignare mais ce n’est pas la seule. Il peut également signifier « mettre en signes ». Le philosophe Saint Augustin a magnifiquement montré comment le maître explique à son élève le monde en nommant les choses. Quelle responsabilité pour le professeur de décrypter l’actualité, de poser des mots sur les évènements de ce début de XXIe siècle ! La célèbre phrase d’Albert Camus nous le rappelle : « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde ». Cette tâche, le maître doit s’en emparer car c’est ainsi que tout son enseignement va prendre du sens, va montrer le chemin à ces jeunes disciples qui ont besoin d’être affermis dans les principes de vies.

Il est un pan de l’actualité douloureux à enseigner mais pourtant incontournable. Si l’enseignement de l’histoire n’est pas toujours glorieux, qu’en est-il des barbaries contemporaines qui se multiplient, qui blessent, tuent, volent aux familles et aux nations leurs êtres chers ?

Il y a trois ans, trois ans déjà, quatre adultes et trois enfants ont été lâchement abattus dans les villes de Montauban et de Toulouse. Parce qu’ils étaient militaires ou juifs, aimant chacun la République française, ils ont été la cible d’un plan de haine. Ces horreurs forment malheureusement une brique de l’histoire de notre pays, de notre région.

3ansdeja800Mercredi 18 mars, alors que dans une classe de CE2-CM de l’école protestante Jean Calvin à Toulouse, l’enseignante lit un résumé de ces événements, beaucoup n’ont qu’un vague souvenir de la minute de silence vécue alors. Ils étaient encore si jeunes. Mais les voilà maintenant gagnant en maturité et curieux de mieux comprendre ce monde. C’est donc dans une orientation pédagogique claire que l’établissement met l’emphase sur ce décryptage de l’actualité. Comprendre maintenant pour être des citoyens positionnés demain, des citoyens qui oeuvrent pour le bien de leur nation.

Jeudi 19 mars, une grande majorité d’élèves de cette classe, accompagnés par les enseignants et des parents étaient présents à la Halle aux Grains à Toulouse pour commémorer les attentats de mars 2012. «  Il est important de se rappeler et de rendre hommage aux victimes et à leurs familles» dira un élève et un autre de rajouter : « tous les hommes sont libres, il faut commémorer ces évènements pour qu’ils ne se reproduisent pas ».

En conclusion de cette cérémonie, les personnalités présentes avec entre autres Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur, Jean Luc Moudenc, maire de Toulouse , Yossi Gal, ambassadeur d’Israël, Bernard Henri Lévy, Philosophe, ont été invitées à se réunir sur la scène autour de la lecture de la prière pour la République. Moment solennel. « Eternel, regarde avec bienveillance depuis ta demeure sainte notre pays la République française, et bénis le peuple français ». Dans un coin de la salle, des élèves ont joint leurs « Amen » à ceux de l’assistance. L’adhésion de leurs cœurs était là. La leçon de vie était enseignée. Puissent les choix d’orientation pédagogique de cet établissement protestant contribuer à donner un regard éclairé sur l’actualité à ces citoyens de demain.

Martine Durand